Comment fonctionnent les obligations ?
Vous avez sûrement déjà entendu ce terme si vous avez eu une discussion autour des marchés financiers. On vous parle d’ETF, d’actions… mais pourtant, une classe d’actifs est souvent oubliée par les investisseurs : ce sont les obligations.
Elles sont utilisées aussi bien par les gouvernements que par les grandes entreprises pour se financer. Elles jouent un rôle majeur dans la gestion de portefeuille, notamment pour équilibrer le risque et assurer un revenu régulier.
Ce guide a pour but de vous expliquer ce que sont les obligations, comment elles fonctionnent, et comment les intégrer intelligemment dans une stratégie d’investissement.
Qu’est-ce qu’une obligation ?
Une obligation est un titre de créance. C’est-à-dire une dette émise par un État, une entreprise ou une collectivité territoriale pour emprunter de l’argent auprès d’investisseurs. En échange de cet emprunt, l’émetteur s’engage à verser des intérêts. On les appelle “coupons” à intervalles réguliers. Il s’engage aussi à rembourser le capital à une date d’échéance définie à l’avance.
Voyons ensemble un exemple concret : si l’État français émet une obligation d’une valeur nominale de 1 000 € avec un taux d’intérêt de 2 % sur 10 ans, cela signifie que l’investisseur recevra 20 € par an pendant 10 ans, puis récupérera les 1 000 € initiaux à l’échéance.
Une obligation est donc une promesse contractuelle entre l’émetteur et le détenteur. C’est ce qui les différencie des actions. Elles offrent un droit à dividende non garanti et une participation au capital de l’entreprise.
Les grandes catégories d’obligations
Toutes les obligations ne se valent pas, et il est essentiel de distinguer les différentes typologies. On retrouve principalement :
Les obligations d’État (comme les OAT françaises, les Treasury Bonds américains ou les Bunds allemands) qui sont généralement considérées comme des placements très sûrs, car l’émetteur est un État souverain.
- Les obligations d’entreprise, ou « corporate bonds », qui sont émises par des sociétés privées. Leur rendement est souvent plus élevé, car elles sont jugées plus risquées.
- Les obligations à haut rendement (ou “high yield”), qui proviennent d’émetteurs plus fragiles, souvent notées en dessous de BBB par les agences de notation. Ces obligations sont plus volatiles mais offrent aussi un potentiel de rendement supérieur.
- Acheter une obligation Apple ne comporte pas le même risque ni le même rendement qu’une obligation d’une start-up dans la tech, notée spéculative. Le choix va donc dépendre du niveau de risque que l’on peut assumer.
Pourquoi investir dans les obligations ?
Une source de revenu régulière et prévisible
Les obligations jouent plusieurs rôles fondamentaux dans une stratégie d’investissement équilibrée, que ce soit pour les investisseurs particuliers ou professionnels.
Le premier grand avantage réside dans leur capacité à offrir une source de revenu régulière.
Contrairement aux actions, dont les dividendes peuvent varier ou même être supprimés, les obligations versent des coupons fixes ou variables à des échéances déterminées.
Elles offrent ainsi une visibilité précieuse sur les flux de trésorerie, ce qui est particulièrement utile pour planifier son avenir financier.
Prenons l’exemple d’un investisseur qui achète une obligation d’entreprise de 10 000 € avec un coupon annuel de 4 %. Chaque année, il percevra 400 € d’intérêts, quelle que soit l’évolution des marchés, tant que l’entreprise reste solvable. Ce caractère prédictible fait des obligations un outil de stabilité, utile dans un portefeuille diversifié.
Réduire la volatilité grâce aux obligations
Deuxième atout : les obligations permettent de réduire la volatilité globale d’un portefeuille. En période de turbulences sur les marchés boursiers, les obligations, notamment les obligations d’État de pays développés, agissent souvent comme des valeurs refuge. Lors de la crise du COVID-19 au printemps 2020, par exemple, les actions ont fortement chuté tandis que les obligations souveraines ont maintenu voire augmenté leur valeur, offrant ainsi un contrepoids précieux pour les portefeuilles mixtes.
La stratégie d’allocation 60/40 : équilibre entre croissance et sécurité
Cela nous mène directement vers une stratégie d’allocation largement connue de tous : le fameux 60/40, composée de 60 % d’actions et 40 % d’obligations.
Cette combinaison repose sur l’idée que les obligations viendront compenser les phases de baisse des actions, tout en générant un revenu modéré mais stable.
Ce type de pondération est particulièrement adapté aux investisseurs long terme qui recherchent à la fois de la croissance et un certain niveau de sécurité.
Le rôle des obligations évolue aussi avec l’âge et le profil de l’investisseur. Un jeune investisseur, avec un horizon de placement de 20 ou 30 ans, pourra se permettre de supporter davantage de volatilité et privilégiera les actions. À l’inverse, un investisseur proche de la retraite aura tout intérêt à sécuriser son capital en augmentant la part d’obligations dans son portefeuille, afin de garantir des revenus fixes et de limiter l’exposition au marché action.
Un pilier pour les investisseurs institutionnels
Enfin, notons que les obligations ne sont pas uniquement utiles pour les particuliers. Les grands investisseurs institutionnels, comme les compagnies d’assurance ou les fonds de pension, en détiennent de grandes quantités pour gérer leurs engagements à long terme. Cela montre à quel point les obligations sont perçues comme une brique essentielle dans la construction de portefeuilles robustes, même au plus haut niveau professionnel.
Comment fonctionne le marché obligataire ?
À l’inverse des actions, qui s’échangent en continu sur des marchés dits “centralisés” comme Euronext ou le NYSE, les obligations sont principalement négociées sur le marché de gré à gré (OTC – Over The Counter).
Cela signifie que les transactions se concluent directement entre investisseurs ou via des courtiers, souvent pour des montants relativement importants.
Le prix d’une obligation peut varier en fonction de plusieurs facteurs : le niveau des taux d’intérêt, la solidité de l’émetteur, ou encore l’évolution de la conjoncture économique. Par exemple, si les taux d’intérêt remontent, le prix des anciennes obligations (qui versent des coupons moins élevés) baisse mécaniquement. À l’inverse, en période de baisse des taux, les obligations existantes deviennent plus attrayantes et leur prix augmente.
Les obligations et les taux d’intérêt : un lien fondamental
Il faut comprendre une notion essentielle : la relation inverse entre les taux d’intérêt et le prix des obligations.
Imaginez qu’une obligation existante offre un coupon de 3 %, alors que de nouveaux titres émis sur le marché offrent désormais un rendement de 5 %.
Pour rester compétitive, cette obligation devra se négocier à un prix inférieur à sa valeur nominale, de façon à aligner son rendement effectif sur celui du marché.
Ce mécanisme de “réajustement par le prix” explique pourquoi les traders surveillent de très près l’évolution des taux directeurs des banques centrales comme la BCE ou la Fed. Une simple annonce de hausse ou de baisse de taux peut déclencher de forts mouvements sur les marchés obligataires.
Comment analyser une obligation ?
Comprendre la valeur réelle d’une obligation ne se limite pas à son prix d’achat.
Pour évaluer sa valeur de manière pertinente, un investisseur doit s’intéresser à plusieurs indicateurs techniques et financiers, tels que :
- Le rendement à l’échéance ( ou le Yield To Maturity, YTM pour les amateurs d’acronyme)
- La duration
Le rendement à l’échéance : une mesure intégrée de la rentabilité
Commençons par le rendement à l’échéance. Ce taux représente le rendement annuel moyen que vous obtiendrez si vous conservez l’obligation jusqu’à sa date de maturité. Vous devez tenir compte de trois facteurs : le prix d’achat de l’obligation, les coupons reçus, et le remboursement final à la valeur nominale. Cela permet de comparer objectivement deux obligations, même si elles n’ont pas le même prix, la même maturité ou le même taux nominal. Par exemple, si vous achetez une obligation au prix de 98 € pour une valeur nominale de 100 €, avec un coupon annuel de 3 %, votre rendement réel sera supérieur à 3 %. Vous bénéficiez aussi d’un gain en capital de 2 € à l’échéance. Le YTM vous donne cette vue d’ensemble intégrée, en pourcentage annualisé.
Le rendement actuariel (ou Yield to Maturity – YTM) est particulièrement utile dans un environnement où les taux d’intérêt varient.
Lorsque l’on hésite entre plusieurs obligations, le YTM permet de faire un choix rationnel. Il faut alors comparer la rentabilité attendue par le marché pour chaque titre, à condition bien sûr de conserver l’obligation jusqu’à son échéance. Il s’agit donc d’un outil central pour évaluer le véritable rendement d’une obligation, au-delà de son simple coupon.
La duration
Mais évaluer une obligation ne revient pas uniquement à se demander « combien vais-je gagner ? » Il faut aussi se demander : « Quels risques vais-je prendre ? » Et c’est là qu’intervient la duration, un outil puissant pour comprendre la sensibilité d’une obligation à l’évolution des taux d’intérêt. Plus la duration est longue, plus l’obligation réagit fortement à une variation de taux. En d’autres termes, c’est une mesure du risque de taux.
Exemple de duration
Vous détenez une obligation à 30 ans avec une duration de 20. Si les taux d’intérêt augmentent de 1 %, le prix de l’obligation pourrait chuter d’environ 20 %. À l’inverse, si les taux baissent de 1 %, l’obligation pourrait voir son prix augmenter dans la même proportion. La duration est donc un excellent indicateur pour anticiper la sensibilité d’un titre obligataire aux variations des taux d’intérêt.
En revanche, une obligation qui a une duration de 1,5 sera beaucoup moins affectée : une hausse de 1% des taux ne provoquera qu’une baisse de 1.5% de son prix.
Ainsi, la duration vous permet de choisir des obligations en fonction de votre tolérance au risque et de vos anticipations de marché. Si vous pensez que les taux vont monter, mieux vaut privilégier des obligations à courte duration. Si vous anticipez une baisse des taux, alors les obligations longues, bien que plus volatiles, peuvent offrir une plus-value potentielle plus importante.
Investir à long terme avec les obligations
Pour ceux qui adoptent une approche long terme dans la gestion de leur portefeuille, les obligations représentent une pièce maîtresse. Elles offrent une visibilité sur les revenus futurs, permettent une diversification prudente et facilitent la gestion des pondérations du portefeuille en fonction de l’horizon de placement et de la tolérance au risque.
Un portefeuille équilibré pourrait ainsi inclure :
- des obligations souveraines à long terme pour la stabilité ;
- des obligations d’entreprise de qualité pour un rendement modéré ;
- une petite poche de high yield pour dynamiser la performance.
L’utilisation d’ETF obligataires permet aussi de diversifier à moindre coût, tout en accédant à des centaines d’émetteurs à travers un seul produit coté.
Le trading d’obligations : une approche plus tactique
Pour les traders, les obligations ne sont pas qu’un instrument passif. Vous pouvez spéculer sur leur prix via des produits dérivés. Vous pouvez le faire via les contrats à terme, les options sur taux ou les futures sur T-Notes. Certains traders cherchent à capter les variations de taux ou les écarts de spread entre différentes obligations.
Exemple de stratégie : anticiper une baisse des taux de la BCE et acheter des obligations à long terme pour bénéficier de la hausse de leur prix. Inversement, en cas de resserrement monétaire, on pourra shorter les obligations futures.
Quels sont les risques des obligations ?
Contrairement à une idée reçue, les obligations ne sont pas sans risque. Elles sont exposées :
- au risque de crédit, si l’émetteur fait faillite ;
- au risque de taux, si les taux augmentent ;
- au risque d’inflation, qui rogne le pouvoir d’achat des coupons fixes.
Par exemple, en 2022, de nombreux investisseurs ont perdu de l’argent sur les obligations en raison de la remontée très rapide des taux d’intérêt par la FED. Cette hausse a entraîné une forte baisse des prix obligataires. C’est un rappel utile : même un placement réputé « sûr » doit être activement géré, car il n’est pas exempt de risques.
Conclusion
Les obligations sont bien plus qu’un simple produit pour investisseurs prudents. Elles sont un baromètre de l’économie, un outil de protection, et une source d’opportunités si on les comprend bien. Que tu sois investisseur long terme ou trader actif, intégrer les obligations dans ta stratégie peut réellement faire la différence.
Pour aller plus loin, tu peux consulter des outils comme Portfolio Visualizer. Cet outil permet d’analyser ton allocation, de suivre les spreads de taux et les courbes de rendement.